Les secrets d'un flop signé Ferrari
Ferrari est de nos jours une écurie qui se focalise sur la victoire et la lutte pour le titre mondial, mais il y a quelques décennies les choses étaient tout autre.
Photo de: Giorgio Piola
Une des campagnes les plus difficiles eut lieu en 1992 quand Ferrari a conçu la F92A, une voiture audacieuse mais désastreuse. Elle n'amassa que 21 points et offrit deux podiums, lors d'une année marquée par les sorties de piste et les problèmes de fiabilité.
À l'époque, l'aérodynamique de la voiture, et surtout du concept de double fond plat, a été mis en cause en raison de ses mauvaises performances. Mais une interview de Jean Alesi a offert une nouvelle perspective sur ce qui s'est passé. Ainsi, en nous aidant de l'apport d'un de ses concepteurs, Jean-Claude Migeot, nous allons lever le voile sur ce qui s'est vraiment joué cette année-là.
Au lieu d'être un problème de châssis, il est désormais envisagé que la racine des difficultés se trouvait en réalité du côté du moteur V12. "Le moteur souffrait d'un blow-by, c'est-à-dire qu'il y avait une fuite d'huile des anneaux de piston dans la chambre de combustion", a expliqué Alesi à Motorsport.com. "Cela provoquait la perte de 40 à 50 chevaux. Mais dans la tradition de Ferrari, on ne pouvait pas dire que c'était la faute du V12. Au lieu de cela, la faute a été attribuée à la voiture – ce qui est dommage car le concept était intéressant."
Il était bien facile d'attribuer les problèmes de cette voiture au nouveau et audacieux package aérodynamique créé par l'équipe, avec ses pontons type "avion de chasse" montés sur un second fond plat. Le fonctionnement et l'aspect étaient très différents de ce qui se faisait sur la grille.
À l'époque, il était suggéré que le double fond plat était flexible et que la charge aérodynamique devenait instable, rendant donc la monoplace difficile à contrôler. Migeot assure que ce n'était pas le cas. "La voiture était très novatrice, avec un nouveau V12 et un nouveau châssis, mais les problèmes étaient mécaniques : ils étaient dus au manque de puissance, causé par le blow-by. Nous devions utiliser un réservoir d'huile supplémentaire afin de pouvoir finir les courses avec suffisamment de lubrifiant, ce qui ne faisait qu'ajouter aux difficultés que nous avions pour régler la nouvelle suspension avant à mono-amortisseur."
Durant cette même année, l'équipe Dallara BMS disposait de la version précédente du V12 Ferrari et parvenait à réaliser des vitesses de pointe supérieures. Et une idée germa en milieu d'année.
Migeot explique : "Ils nous ont envoyés faire un test sur une piste de grande vitesse avec Jean Alesi, en présence de Sante Ghedini [alors team manager de la Scuderia], pour savoir pourquoi nous ne pouvions pas atteindre une bonne vitesse de pointe. Ils ont monté le moteur de l'année précédente sur la voiture : Alesi a immédiatement compris qu'il s'agissait d'une autre voiture avec plus de chevaux..."
En comparant la 92A et la 93A, on peut voir que les échappements devaient être surélevés pour permettre la mise en place du double fond plat, tandis que les radiateurs étaient plus larges pour compenser leur hauteur limitée. La voiture créait en fait beaucoup d'appui, ce qu'elle démontrait sous la pluie, comme le décrit Migeot.
"Nous avons fait démonstration des capacités de la voiture à Magny-Cours quand il a commencé à pleuvoir. Tout le monde était en piste avec des slicks, mais Jean a été le dernier à retourner aux stands pour changer de pneus, car la F92A avait beaucoup de grip, même sur le mouillé."
Migeot explique également que même si Ferrari savait que la voiture offrait un bon niveau d'appui, ses tentatives pour comprendre et développer monoplace n'ont fait qu'empirer les choses. Par exemple, l'écurie créa une autre version du double fond plat pour vérifier que les instabilités de la voiture n'étaient pas responsables de son comportement.
Ensuite, il a été décidé d'équiper la voiture d'une boîte de vitesses transversale. Migeot indique : "Elle était plus compacte, mais également plus large, donc elle a affecté le passage du flux d'air dans les deux canaux. Pour faire court, nous allions de moins en moins vite."
"C'était une grande déception parce que je suis devenu le bouc émissaire d'une situation que je ne gérais pas. Et c'était vraiment dommage parce que le F92A avait un très long fond plat qui réussissait à générer beaucoup de charge. C'était un concept qu'il fallait cependant développer. Mais il a été interdit l'année suivante par une modification de la réglementation."
"Ferrari a toujours vécu dans le mythe de ses moteurs, il n'y a donc eu aucune critique des V12 car cela aurait été comme jurer à l'église. Bien qu'il ait semblé évident à tout le monde que le moteur était le gros problème de la F92A, la faute a été attribuée à l'aérodynamique."
Galerie :
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