Interview Villadelprat - Non, je ne crois pas à la logistique Haas F1 Team
Gene Haas au siège de Haas F1 Team à Kannapolis, N.C.
Rainier Ehrhardt
L’équipe Haas travaille activement sur la mise en place de son projet F1 consistant à faire son apparition sur la grille l’an prochain.
Après avoir mené les départements techniques de nombreuses équipes dans le passé, réalisé le design de l’usine F1 d’Enstone et même tenté de monter un team (Epsilon) lors de la précédente impulsion de la FIA ayant vu arriver à bord Virgin (Manor/Marussia), Hispania Racing Team et Lotus (Caterham), Joan Villadelprat est l’une des personnes les plus qualifiées pour comprendre et détailler ce que sont les difficultés matérielles, financières et humaines et auxquelles fait face aujourd’hui le team américain.
Un team qui souhaite faire les choses différemment, en menant une partie de ses opérations depuis les Etats-Unis, tout en travaillant étroitement avec Ferrari en se faisant fournir tout ce que la réglementation actuelle autorise dans le domaine technique… Motorsport.com s’est entretenu en longueur avec l’ingénieur espagnol au sujet de ce projet qui laisse de nombreuses têtes pensantes encore sceptiques.
Comment jugez-vous le projet Haas en F1, avec votre regard sur les contraintes logistiques, R&D, techniques ?
Je ne sais pas… Cela dépend de combien de il [Gene Haas] souhaite investir et injecter chaque année. Ce n'est pas quelque chose dans quoi il faut placer au départ et puis plus rien. Il faut en remettre, et en remettre l'année suivante, etc.
On peut obtenir les bonnes personnes si on les rend amoureuses du projet
Joan Villadelprat
Se bâtir une réputation, aller chercher les bonnes personnes. Les bonnes personnes vont là où sont les bons projets. Les bonnes personnes ne coûtent pas vraiment cher, vous savez? Un bon Directeur d'Equipe, Directeur Technique, etc. On peut obtenir ce genre de personnes si nous les rend amoureuses du projet. Mais sans bon projet, ou en étant incapable de bien le vendre, alors, ces gens ne viennent pas. Et quand les gens viennent, il faut les payer le double! Et c'est là que la compagnie explose! [rires]
Et pour attirer les bonnes personnes, il faut les bonnes infrastructures. On en revient à la mise en place de quelque chose de solide… Croyez-vous à la logistique Haas?
Non, non. Oh non!
Comment faire tourner ça en dehors d'Europe?
Je ne sais pas! J'ai beaucoup de mal à comprendre comment ils vont le faire. C'est déjà un problème quand vous avez une compagnie et une soufflerie distantes de 10 kilomètres. Imaginez si tout est dispersé partout dans le monde! C'est très difficile.
Ça va coûter beaucoup d'argent et je ne sais pas s'ils vont faire un bon travail. C'est ce que je pense actuellement. Faire venir un Anglais aux USA est très difficile. C'est très difficile aussi de faire déménager un Américain ici. Et faire moitié-moitié? Je ne sais pas. Je n'ai pas de boule cristal, mais ça me semble compliqué.
"J'ai beaucoup de mal à comprendre comment ils vont le faire. C'est déjà un problème quand vous avez une compagnie et une soufflerie distantes de 10 kilomètres".
Pensez-vous qu'il s'agit plutôt de marketing, pour garder la face et jouer de cette identité américaine, mais qu'en réalité, le team devra en réalité fonctionner au quotidien depuis l'Europe de plus en plus?
En le faisant correctement à 50-50 depuis les USA, ça peut marcher, en ne gardant que le marketing, peut-être des voitures de démo, l'administratif là-bas. Mais il faut les bonnes installations, les bonnes personnes, les bons fournisseurs et c'est un très petit monde.
Il est déjà très difficile d'essayer de faire une équipe F1 en Espagne car toute la crème de la crème est en Angleterre. Le sang coule là-bas. Idem en France, même problème. En Allemagne, ça a été un désastre. L'Italie, ils y arrivent encore parce que c'est Ferrari. Mais en dehors de l'Angleterre ou de l'Italie, vous allez souffrir. Sauber paie plus d'argent pour que les gens viennent en Suisse.
Et pourtant, vous-même, vous avez essayé de lancer votre projet F1 en Espagne!
C'était différent. L'Espagne a été dévaluée pendant des années, elle était hors-jeu. Mais il y a beaucoup de jeunes gens intelligents qui poussent et ils ont l'envie que j'avais dans le passé. Au final, une compagnie, ce sont des individualités. Et quand vous avez les gens qui ont envie de faire le boulot et de travailler en équipe, vous avez quelque chose qui peut aller très loin.
Et la preuve de ça fut notre voiture [Epsilon] pour Le Mans. On se battait avec Audi, Peugeot, Pescarolo…Des gens qui avaient été dans ce business pendant de longues, longues années. Ils ont eu l'air idiots : on arrive avec voiture toute noire, pas le moindre sponsor dessus et on se bat avec eux. On peut faire des choses! Par ailleurs, l'Espagne est un pays dans lequel il est facile de faire venir du monde. On vit bien, il y a le soleil, on mange bien! C'est différent! C'est important.
Le fameux facteur humain! On dit que c'est la raison pour laquelle Ferrari n'a jamais réussi à faire venir Adrian Newey...
Oui! Parce que la première chose qu'ils vous disent, c'est "attendez, je vais demander à ma femme!" Quand on emploie quelqu'un, on n'emploie pas uniquement cette personne, mais un peu toute sa famille…
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