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La Formule 1 protège-t-elle assez le personnel de piste ?

Près de deux ans après l’accident de Jules Bianchi, la Formule 1 a beaucoup progressé sur le plan de la protection des pilotes et des procédures, et devrait encore le faire. Mais tous les acteurs de la F1 n’ont pas la même chance…

Un commissaire court sur la piste alors que Nico Rosberg, Mercedes AMG F1 W07 Hybrid mène au restart

Photo de: XPB Images

Voiture de Sécurité Virtuelle, rehaussement des protections latérales des pilotes, horaire des courses avancé pour éviter de coïncider avec la chute de luminosité, renforcement des crash-tests, multiplication des drapeaux rouges lors des essais libres et bientôt introduction d’une protection du cockpit, quelle que soit sa forme ; la Formule 1 en fait beaucoup depuis l’accident de Jules Bianchi (et celui de Justin Wilson en IndyCar) pour essayer de corriger des problèmes qui avaient notamment été entrevus et relevés par le rapport qui avait suivi cet épisode tragique.

Tout est loin d’être parfait sur ce plan, mais au moins des progrès sont notables et, aussi minces soient-ils parfois, ils doivent être soulignés.

Cependant, il a suffi de quelques minutes - 4’56’’ pour être précis - à savoir le temps entre la neutralisation de la course au premier tour du Grand Prix de Singapour et sa relance à la fin du deuxième tour, pour se rendre compte que les instances ne semblent pas prendre au sérieux d’autres problématiques de sécurité très vives.

Unsafe release

Premier épisode. Alors que l’ensemble des monoplaces pénètre dans la voie des stands, derrière le Safety Car, pour laisser les commissaires nettoyer la piste et dégager la Force India accidentée, Valtteri Bottas, victime d’une crevaison, effectue un arrêt. Une fois cela fait, il est libéré par son équipe au moment précis où Sebastian Vettel passe.

Les deux hommes se retrouvent côte à côte dans la voie étroite qui sépare le muret des stands des zones de travail des équipes. Si étroite que, quand la Williams passe devant le stand Force India, elle frôle un mécanicien qui ne se rend compte de rien. Bottas finit par ralentir pour se ranger derrière la Ferrari, là où il aurait dû être dès la fin de son arrêt. Le drame est évité de peu.

Sebastian Vettel, Ferrari SF16-H suit le peloton qui entre dans les stands derrière le Safety Car

Pour cette faute grave, qui met en jeu la sécurité du personnel qui travaille dans la pitlane avec des protections réelles mais sommaires dans le cas de chocs avec des monoplaces, tout le monde s’attend à ce que les commissaires, saisis par la direction de course, se montrent sévères. Après tout, unsafe release signifie "libération dangereuse" ; il semble que, dans ce cas précis, elle l’était.

Eh bien non. Non, aucune sanction, pas même une réprimande ne vient en réponse à cette défaillance collective qui a bien failli blesser un homme. Les commissaires, dans leur décision, estiment que Bottas "a réalisé le risque de collision et a pris les mesures nécessaires en freinant et se positionnant derrière".

Nous sommes donc en droit de penser que, même s’il avait percuté le mécanicien - qui n’était pas en dehors de sa zone de travail -, le simple fait de ralentir et de se positionner derrière la monoplace de Vettel aurait suffi à décharger l’écurie Williams de sa responsabilité dans ce qui aurait résulté en une blessure ou pire.

Difficile de soutenir une telle vision des choses et c’est pourtant ce qui est renvoyé par cette décision et, plus globalement, par l’inaction de la direction de course face à de récents cas d’unsafe releases.

Pas plus tard qu’en Belgique, Fernando Alonso et Nico Hülkenberg se sont retrouvés côte à côte dans la voie des stands, se touchant même, sans que les commissaires n’y voient rien à redire. Même chose en Grande-Bretagne où, alors que les stands étaient remplis de mécaniciens prêts à intervenir pour changer les pneus des voitures lors d’une course dans des conditions changeantes, Felipe Massa a été libéré à côté de voitures qui arrivaient.

Sebastian Vettel, Ferrari SF16-H dans les stands

Ce ne sont là que des cas récents, mais sur les deux dernières saisons il est possible d’en recenser d’autres sans que cela n’émeuve personne, parfois sans même qu’une enquête ne soit lancée par les commissaires.

D’autres configurations d’unsafe releases, tout aussi dangereuses, sont traitées avec légèreté, et notamment quand une écurie libère un pilote avec une roue mal fixée sans être sanctionnée (Ferrari libérant Räikkönen lors du GP d’Australie 2015 ou laissant partir Vettel, qui cause un accrochage en piste lors des essais libres du GP de Bahreïn 2015, à chaque fois avec une roue mal fixée) ou alors assez peu sanctionnée (trois places de pénalité sur la grille en Chine pour Hülkenberg dont la roue s’était détachée alors qu’il était en piste).

Cela est d’autant plus étonnant que, après l’incident lors duquel une roue détachée de la Red Bull de Mark Webber avait percuté un cameraman dans la ligne des stands lors du GP d’Allemagne 2013, la FIA avait, à raison, serré la vis pour se prémunir face à de tels cas.

Or, aujourd’hui, le risque est toujours aussi réel de blesser gravement, voire pire, des gens qui ne sont pas entourés par une cellule de survie quand ils opèrent dans les stands. Et comme souvent, l’impression est que la direction de course juge une situation non pas par rapport à sa gravité intrinsèque mais par rapport aux conséquences de cette situation. Cela renforce le sentiment d’inconstance, déjà largement présent dans d’autres domaines.

Un commissaire sur la piste

Deuxième épisode. Moins de cinq minutes après avoir neutralisé la course suite à l’accident de Hülkenberg, le Grand Prix de Singapour est relancé. En moins de deux tours. Une diligence qui a été remarquée, voire appréciée de la part du monde de la F1 peu habitué à la rapidité d’intervention de la voiture de sécurité, surtout à Singapour.

Problème : un commissaire était encore en piste pour la nettoyer et a vu Nico Rosberg et le reste de la meute foncer sur lui à une vitesse proche des 300 km/h.

L’image a glacé puis a fait, heureusement, sourire grâce à la capacité d’Internet à détourner des situations et à en faire des "memes" qui se répètent à l’infini comme celui retweeté par Kevin Magnussen, qui met en scène quelques stars ou événements iconiques de la F1 des dernières années.

 

Mais au-delà de la situation en elle-même de ce commissaire, c’est de nouveau la direction de course qui doit être pointée du doigt. En effet, Motorsport.com a recueilli les déclarations d’un porte-parole de la FIA qui a expliqué que lors de la course, la procédure habituelle - à savoir qu’il est demandé trois fois si la piste est dégagée avant de procéder à une relance de la course - n’a pas été suivie, a priori sur demande des équipes.

Que les écuries demandent ce genre de choses pour des raisons qui peuvent être techniques, de spectacle, etc. est logique, mais ce qui l’est moins est que la direction de course accepte cela sans s’assurer que tout sera fait pour garantir la sécurité des hommes qui travaillent pour que la piste soit à nouveau praticable.

L’intervention en elle-même a été rapide, c’est à mettre au crédit des commissaires de Singapour, mais toutefois pas assez rapide pour que la course soit relancée dans des conditions parfaitement sûres dès la fin du deuxième tour. Ce changement de procédure est donc un échec car la vie d’un homme a été mise en jeu et que cela a entraîné, en sus, un drapeau jaune immédiatement après la relance alors que la piste est normalement entièrement sous régime de drapeau vert lors d’un restart.

Les commissaires enlèvent la Sahara Force India F1 VJM09 de Nico Hulkenberg du circuit

Drapeau jaune

Sans chercher bien loin, là encore, il n’est pas forcément très étonnant de voir ce genre de choses se produire quand, il y a peu de temps, des commissaires de course ont jugé qu’un tour de pole position effectué avec un passage dans une zone de double drapeau jaune était valable, estimant que le pilote, Rosberg, avait suffisamment ralenti.

C’était en Hongrie et, certes, aucun commissaire de piste n’était vraiment en piste à ce moment-là, mais s’il y en avait eu, ne serait-ce qu’un, sur le bord de piste, à quelques mètre de la voiture lancée dans un tour rapide, cela n’aurait a priori, dans la logique de la décision rendue ce jour-là, rien changé puisque le double drapeau jaune le signifie déjà potentiellement. Donc le ralentissement aurait été suffisant.

Conséquence ou non de la polémique qui s’en était suivie, Sergio Pérez, pris la main dans le sac d’amélioration et de dépassement sous double drapeau jaune lors de la Q2 à Singapour, a été pénalisé de huit places sur la grille du GP. Une bonne chose, certes, mais est-ce suffisant et surtout est-ce réellement ce qui est attendu de la part de la direction de course ?

Charlie Whiting avait indiqué après le GP de Hongrie qu’à l’avenir le drapeau rouge serait brandi en qualifications dès lors qu’un double drapeau jaune était agité pour, je cite, "ne pas entrer dans ces discussions où il faut décider si un pilote a ralenti ou pas. Si l’on applique la règle du double drapeau jaune à la lettre, elle dit qu’il faut être prêt à s’arrêter".

Louable intention - même s'il est relativement "amusant" de constater que l'inquiétude porte sur les "discussions" et pas tant sur la sécurité - qui n’a malheureusement pas été suivie d'effet lors des qualifications à Singapour puisqu’en dépit des accidents de Grosjean et de Button puis du double drapeau jaune agité, le drapeau rouge n’a jamais été brandi.

Même si l’ensemble des événements décrits ci-dessus s'est sans doute passé dans un laps de temps très court, il y a fort à parier que si Pérez avait vu le drapeau rouge au lieu des drapeaux jaunes, son attitude aurait été bien différente et la sécurité des personnes qui auraient potentiellement pu se trouver en piste, auprès des pilotes et des monoplaces accidentés, aurait été meilleure.

Et surtout, le constat, deux ans après l'accident mortel de Bianchi, est qu'un des facteurs qui a joué un rôle dans la sortie de piste du Français - à savoir le respect tout relatif d'un double drapeau jaune - demeure soumis à un contrôle très nébuleux et finalement assez peu dans l'esprit de la règle. Ce n'est pas la seule chose qui sort de l'esprit du règlement en Formule 1, mais là c'est la sécurité de beaucoup d'acteurs qui est en jeu.

Conclusion

Pour finir, personne ne souhaite que la direction de course ne se mue en monstre froid sanctionnant à tout va la moindre touchette, la moindre action… en piste. Il a d’ailleurs été demandé, avant la saison, aux commissaires d’être plus cléments dans le cadre des luttes en piste. Bonne ou mauvaise chose, chacun a sa propre opinion, reste que cela concerne les pilotes avant tout, même si tout ne doit pas être accepté.

Les unsafe releases et la sécurité des commissaires sont une chose totalement différente et, dans ce cadre là, aucune tolérance ne devrait être permise, ne serait-ce que pour dissuader les écuries qui tenteraient d’en tirer un avantage : Williams aurait-elle relâché Bottas à coté de Vettel si elle savait qu’à l’instant où cette situation se produisait, de manière automatique et systématique, cela donnerait lieu à un stop-and-go de 10 secondes ou même, soyons extrêmes, une disqualification ? Pérez aurait-il continué son effort en Q2 malgré les drapeaux jaunes si la règle de base était appliquée à la lettre ?

Difficile à croire. C’est quand le prix à payer pour une prise de risque est faible que le risque est pris.

Car, de nouveau, ce ne sont pas vraiment les pilotes - protégés en grande partie par des dispositifs de sécurité ultramodernes dans leurs F1 -, ni la direction de course et les commissaires de course, installés dans les salles qui leur sont réservés, qui sont en danger, mais les personnes qui sont à quelques mètres des F1 : mécaniciens, ingénieurs et responsables des écuries (qui ne portent pas de protections particulières sur le muret des stands), commissaires de piste, spectateurs… et qui n’ont pas forcément de pouvoir de décision dans ce qui se passe autour d’eux.

Un commissaire enlève des débris du circuit

Certes, la Formule 1 peut toujours bomber le torse en regardant outre-Atlantique les courses en IndyCar ou en NASCAR, où le personnel qui travaille dans la ligne des stands est souvent en danger du fait de la proximité des stands entre eux ou encore du nombre de voitures qui peuvent entrer en une seule fois en raison des nombreux Safety Cars. Mais c'est justement parce qu'elle est à un niveau de sécurité très important et qu'autant d'efforts ont été faits sur tous les fronts que, quand une défaillance survient, elle est aussi visible et, finalement, insupportable.

Faudra-t-il un jour attendre les images du corps inerte d’un commissaire/mécanicien au sol et de sang répandu sur la piste, les murs, la carrosserie des monoplaces, les images d’une roue écrasant des spectateurs dans les tribunes, en mondovision pour redonner à ces problématiques une véritable portée comme l’a malheureusement fait, dans un autre contexte et d’autres domaines, l’accident de Jules Bianchi ?

En espérant que non, en espérant que cette fois, on n’attendra pas un mort pour modifier ce qui doit l’être, pour rehausser un niveau de sévérité de plus en plus lâche et incertain sur ces questions, pour sanctionner durement quand cela compte vraiment, pour revoir les procédures, pour empêcher l’inconscience et/ou l’incompétence d’irriguer les instances d’un sport parmi les plus dangereux du monde, et pas que pour les pilotes.

À Singapour, il s’agissait peut-être de la dernière fois où la chance était avec ce mécanicien et ce commissaire, et si le pire arrive on ne pourra pas dire que nous ne l’avons pas vu venir.

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