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Paul Ricard 1982 - Arnoux, Prost et Renault, quel pastis !

L'année où Keke Rosberg remporta le titre fut également marquée par plusieurs drames et un nombre record de vainqueurs, mais aussi par la crise entre les pilotes Renault, Alain Prost et René Arnoux, malgré un doublé dans leur GP national.

René Arnoux, Renault RE30B, Alain Prost, Renault RE30B

René Arnoux, Renault RE30B, Alain Prost, Renault RE30B

LAT Images

Le retour du GP de France en 2018

Le Grand Prix de France de Formule 1 fera son retour en 2018 sur le circuit du Paul Ricard. L'occasion de se plonger dans l'histoire de ce Grand Prix !

C'était il y a presque 35 ans. Après une brillante seconde partie de saison en 1981 avec trois victoires et la cinquième place du championnat pour ce qui n'était que sa deuxième année en F1 et la première chez Renault, Alain Prost faisait figure de grand favori début 1982. Il avait, de plus, mis sous l'éteignoir un René Arnoux qui plus est pas vraiment verni, lequel, après avoir lui-même rejeté Jean-Pierre Jabouille dans l'ombre en 1980, pouvait témoigner d'à quel point la roue tourne, et vite, en F1...

En 1982, donc, tout avait bien commencé en Afrique du Sud, Prost s'imposant dans la manche d'ouverture de la saison après une remontée irrésistible rendue obligatoire par une crevaison et un arrêt pour changer de roue en début de course. Longtemps leader mais victime de vibrations sur la fin, son équipier avait cédé également face à Carlos Reutemann mais terminait troisième.

Prost enchaînait sur un second succès au Brésil, sur tapis vert, après la double disqualification de Nelson Piquet et Keke Rosberg (dont la Brabham et la Williams étaient équipées de réservoirs d'eau illégaux leur permettant de rouler en dessous du poids autorisé), tandis qu'Arnoux occupait la cinquième place en début de course quand, effectuant un tête-à-queue, il avait été heurté par Reutemann et contraint à l'abandon !

Une saison virant au cauchemar

Mais les choses se sont terriblement gâtées par la suite. À Long Beach, Prost, en délicatesse avec ses freins, et Arnoux sortirent tous deux de la piste. Au GP de Saint-Marin, boycotté par les écuries membres de la FOCA, Arnoux puis Prost renoncèrent successivement sur un problème de moteur alors qu'ils étaient en tête, laissant les Ferrari de Didier Pironi et Gilles Villeneuve s'entre-déchirer. En Belgique, où le Québécois trouva la mort en qualifications, un souci de turbo (Prost) et un tête-à-queue (Arnoux) eurent raison de leurs espoirs. À Monaco, Arnoux puis Prost abandonnèrent une fois de plus alors qu'ils menaient, mais sur des erreurs de leur part : tête-à-queue pour le premier cité à la Piscine en début de course, choc avec le rail à la sortie de la chicane pour le second à quelques tours de l'arrivée et alors que la pluie s'était mise à tomber.

Alain Prost
Alain Prost

Photo de: Jean-Philippe Legrand

Sur le circuit urbain de Détroit qu'il n'appréciait guère, Prost menait quand un souci avec l'unité de dosage du carburant entrava sa progression - et il ne fut pas classé. Arnoux, victime d'un court-circuit, terminait sa première course depuis l'ouverture à Kyalami, mais en dixième position. Au Canada, il faisait un nouveau tête-à-queue éliminatoire tandis que Prost cassait un moteur. Même cause, même punition pour ce dernier aux Pays-Bas, alors qu'Arnoux était victime d'une sortie de route violente mais sans gravité consécutive à un problème de freins.

À Brands Hatch, enfin, le Grenoblois, à l'intérieur de la troisième ligne, heurta au départ la Brabham de Riccardo Patrese restée scotchée sur la première tandis que Prost, seulement huitième au départ et ayant dû faire un grand écart dans l'herbe pour les éviter, inscrivait le premier point de Renault depuis Interlagos avec la sixième place !

Résultat des courses : rien ne se déroulait comme prévu et après dix des 16 manches du calendrier, Prost, 19 points au compteur et cinquième ex æquo avec Riccardo Patrese au championnat, était devancé par Didier Pironi (35), John Watson (30), Niki Lauda (24) et le futur champion Keke Rosberg (21). C'était bien pire encore pour Arnoux, resté sur les quatre points de sa troisième place en Afrique de Sud et seulement... 16e du championnat.

Un circuit "comparable à aucun autre"

Telle était donc la situation quand tout ce beau monde arriva au Castellet pour le GP de France. À domicile, Arnoux et Prost, déjà auteurs de sept pole positions à eux deux (quatre et trois respectivement), allaient monopoliser la première ligne pour la quatrième fois de l'année sur ce tracé convenant parfaitement à leur V6 turbo avec ses longues courbes et lignes droites.

C'était un long circuit et on avait cette ligne droite du Mistral”, déclarait il y a quelques années Arnoux au journaliste Christopher Hilton pour son livre 1982 : The inside story of the sensational Grand Prix season (Haynes Publishing, 2007, uniquement en anglais). “Une fois qu'on en était à la fin, c'était plus technique, mais aussi à vitesse très élevée. Vous vous souvenez des ‘S’ de la Verrerie, après les stands ? On les passait à plus de 170 mph [près de 275 km/h]. C'est l'endroit où Elio [de Angelis] s'est tué [en 1986] et par la suite, c'est devenu un virage à droite.”

René Arnoux, Renault RE30B
René Arnoux, Renault RE30B

Photo de: LAT Photographic

Quand vous aviez une voiture bien équilibrée, comme j'en avais une pour le GP [en 1982 donc], c'était OK sur le cinquième rapport. Ça voulait dire à fond. Et avec les yeux grand ouverts, pas fermés !”

Dans la [ligne droite du] Mistral, nous allions à 330 km/h mais ce n'était pas excitant. Vous y alliez tête baissée, n'aviez pas grand-chose à faire et pouviez donc vous reposer. C'était en arrivant à la fin et entrant dans Signes [que ça changeait] : vous étiez à 280, 300 km/h et ça devenait un virage difficile.”

J'aimais beaucoup le Ricard. Vous ne pouviez vraiment le comparer à aucun autre circuit car vous aviez cette longue, longue ligne droite, puis la partie technique - et vous aviez plein de problèmes avec les pneus car la piste était très abrasive.”

Brabham, le feu de paille

Les pneus, justement, allaient lui poser des problèmes durant cette course qui allait être à l'origine du “divorce” entre les deux pilotes des monoplaces jaune et noir...

Départ : René Arnoux, Renault RE30B, et Alain Prost, Renault RE30B, en tête
Départ : René Arnoux, Renault RE30B, et Alain Prost, Renault RE30B, en tête

Photo de: LAT Photographic

Avant la course, nous avions décidé que, si nous étions premier et deuxième, Alain devrait gagner”, déclara plus tard le team manager, Jean Sage. “René était d'accord, et il n'y a pas eu de discussion du genre : ‘si l'avance est de tant de secondes’. Quel que soit l'écart entre eux, Alain devait gagner - à moins que les voitures ne soient menacées par une autre, auquel cas l'ordre devait rester le même.”

Alain Prost, pour sa part, rappela par la suite : “Gérard Larousse [directeur de Renault Sport] a dit à René de me laisser passer si nous étions tous deux dans les points en vue de l'arrivée. Je dois préciser que je n'ai jamais fait une telle requête auprès de René ou de lui, tout simplement parce que si j'avais été à la place de René, j'aurais refusé tout net. René n'a pas protesté contre les instructions de Larousse.”

Les deux Renault conservèrent donc leurs positions au départ avant d'être déposées rapidement par les véloces Brabham-BMW de Patrese et du champion du monde, Nelson Piquet, parties pour la seconde course de suite sur une étonnante stratégie - imaginée par l'ingénieur Gordon Murray - consistant à s'élancer avec un réservoir à moitié rempli seulement et à prendre suffisamment d'avance pour s'arrêter à mi-parcours pour remettre la même quantité de carburant afin de, si possible, repartir en tête et s'imposer. Mais ce n'était pas évident avec des voitures peu fiables et Patrese, en tête, allait abandonner, moteur en flamme, dès le huitième des 54 tours, imité par Piquet au 23e...

Riccardo Patrese, Brabham BT50 BMW
Riccardo Patrese, Brabham BT50 BMW

Photo de: LAT Photographic

Injonctions sans réponse

Arnoux et Prost retrouvèrent donc leurs positions de tête, séparés quand même d'une dizaine de secondes et une bonne quinzaine devant Pironi. L'écart ne cessa ensuite d'aller en augmentant pour atteindre la demi-minute. Et malgré les injonctions de son stand, jamais le leader ne laissa son équipier revenir et encore moins le dépasser.

Arnoux s’imposa finalement avec un peu plus de 17 secondes d'avance, déclenchant une série d'échanges véhéments après l'arrivée.

À partir de la mi-course, malheureusement, j'ai eu de sérieux problèmes de vibrations”, expliqua le vainqueur, qui n'était donc pas celui voulu par l'équipe, après l'arrivée. “J'étais secoué comme un sac de haricots et dans la longue ligne droite, je souffrais de grosses douleurs aux mains et essayais juste de garder le volant stable. Je ne pouvais ralentir car je pouvais prévoir un arrêt au stand pour changer de pneus.”

Quand vous avez 23 secondes d'avance sur celui qui vous suit, autant vous arrêter pour le laisser passer. Je ne voulais prendre aucun risque, au cas où je devrais m'arrêter [pour les pneus]. Ce que je veux vraiment dire est que si je n'avais pas eu ces vibrations, j'aurais été encore plus loin devant.”

René Arnoux, Renault RE30B
René Arnoux, Renault RE30B

Photo de: LAT Photographic

Ce à quoi Prost répondit : “Je me fiche que son avance ait été de une ou de 30 secondes. Ses ordres étaient de me laisser passer. Notre situation était trop critique et il était trop important pour nous de gagner le titre.”

Tentant de calmer le jeu, Jean Sage n'en mettait pas moins les points sur les i : “D'un point de vue humain, on peut comprendre la décision de René de rester devant, mais du point de vue de l'équipe, c'est très différent. Évidemment, nous voulons gagner le championnat du monde et Alain a beaucoup plus de points.”

Un argument que, malgré l'écart effectivement conséquent, Arnoux réfuta plus tard : “Nous étions à la moitié de la saison [à près des trois quarts, en fait], j'avais un statut égal à celui de Prost, et c'était une saison où les pilotes ne marquaient pas beaucoup de points. Je trouvais cela complètement anormal de donner ma position de tête, et à un moment, mon avance était de 35 secondes.”

Bien sûr que j'ai vu les panneaux ! Ce que j'ai pensé ? Je n'ai pensé à rien et j'ai poursuivi ma course.”

Didier Pironi, Ferrari 126C2
Didier Pironi, Ferrari 126C2

Photo de: LAT Photographic

Cette affaire éluda tout le reste et fit presque oublier qu'avec les Ferrari de Pironi et Patrick Tambay arrivées dans le sillage des Renault, ce sont quatre Français qui terminèrent en tête de “leur” GP. La suite de cette saison unique en son genre, déjà marquée par la grève des pilotes à Kyalami, le décès de Villeneuve à Zolder, celui de Riccardo Paletti au Canada et cette affaire interne à l'écurie Renault, allait connaître un nouveau drame avec l'accident de Pironi, qui filait vers le titre, en Allemagne.

Prost n'inscrivit plus que les points d'une deuxième place à Dijon et celui d'une sixième à Las Vegas, pour finir quatrième du championnat (à dix points de Rosberg, cinq de Pironi et Watson), deux rangs et six points devant Arnoux pour sa part deuxième à Hockenheim et de nouveau vainqueur à Monza... juste après avoir signé avec Ferrari pour la saison suivante.

Mauvais perdant, Alain Prost ?

Y a-t-il eu un drame au sein de l'équipe après la course ? Oui et non, parce que d'abord, chez Renault ils étaient très contents : ils étaient premier et deuxième du GP de France, nous étions deux pilotes français dans deux voitures françaises. Et l'homme qui avait fini derrière nous était Didier Pironi, celui qui avait terminé quatrième était Patrick Tambay - quatre pilotes français”, relativisa Arnoux des années plus tard.

Mais pour en revenir à l'essentiel, quand vous signez un contrat de numéro deux avec une équipe, avec des clauses précises disant que vous êtes numéro deux et que vous devez respecter ce que l'équipe vous demande, le moment où vous signez est celui où vous donnez votre accord. J'ai signé un contrat sans clause faisant de moi le numéro deux, ou le numéro un en l'occurrence. Avec Alain, nos contrats étaient égaux. Je n'ai jamais été un numéro deux de toute ma carrière !”

Podium : le vainqueur René Arnoux, Renault, le second Alain Prost, Renault, le troisième Didier Pironi, Ferrari
Podium : le vainqueur René Arnoux, Renault, le second Alain Prost, Renault, le troisième Didier Pironi, Ferrari

Photo de: LAT Photographic

Si nous avions été, disons, à deux GP de la fin de saison, et que je n'avais virtuellement pas de points alors que Prost avait la possibilité de gagner le championnat, pourquoi n'aurais-je pas joué le jeu de l'équipe ? Mais au milieu d'une saison aux faibles totaux de points... C'était ridicule.”

Prost conclut quant à lui que vouloir imposer de telles consignes était de toute façon “fou parce que c'était fondamentalement mal juger ce que pensent des pilotes de course”.

Anecdote douloureuse, le perdant du jour sur la piste et en dehors, car considéré par beaucoup comme un mauvais perdant, justement, avait fini cette journée décidément mauvaise pour lui sous les reproches d'un employé de station-service qui lui avait expliqué, l'ayant pris pour son nouvel ennemi juré, tout le mal qu'il pensait d'un certain... Alain Prost.  

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