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Édito - Le Rallye de Pologne s'est-il auto-condamné ?

Alors que l'apparition cette année de nouvelles WRC plus puissantes faisait déjà craindre des vitesses trop élevées sur certains rallyes, le problème de la sécurité s'est encore invité en Pologne le week-end dernier. Une fois de trop, sans doute.

Juho Hänninen, Kaj Lindström, Toyota Yaris WRC, Toyota Racing

Juho Hänninen, Kaj Lindström, Toyota Yaris WRC, Toyota Racing

Sutton Motorsport Images

Vitesse des voitures et sécurité des spectateurs comme des équipages sont les deux mamelles de la sécurité en rallye. Il y a un peu plus de 30 ans, une série d'accidents dramatiques avait ainsi amené la FIA à prendre une décision drastique et unilatérale, laquelle, au-delà des polémiques qu'elle allait susciter, ferait date dans l'Histoire du Championnat du monde de la discipline. On veut parler bien sûr de l'interdiction des fameuses Groupe B, ces monstres de la route alors jugés trop dangereux.

Qui a pu oublier les images de l'accident du pilote portugais Joaquim Santos, dont la Ford RS200 partit dans la foule sur sa manche nationale de la saison en 1986, tuant plusieurs spectateurs ? Ou encore, l'année précédente puis quelques semaines après l'accident du Portugal, les sorties de route mortelles de deux pilotes Lancia au Tour de Corse ? Attilio Bettega en 1985, sur sa Rally 037, Henri Toivonen 12 mois plus tard jour pour jour, sur son effrayante Delta S4, plongèrent dans un ravin, ce second accident étant aussi fatal au copilote du Finlandais, Sergio Cresto.

En 85, un autre drame avait été évité quand la Peugeot 205 Turbo 16 d'Ari Vatanen était elle aussi partie faire une cabriole dans les arbres bordant la route en contrebas, sans conséquence pour l'équipage. Hélas, il n'en serait pas de même quelques semaines plus tard en Argentine, où le même Vatanen fut grièvement blessé dans une nouvelle série de tonneaux.

En ce milieu des années 80, tant la sécurité des spectateurs que la vitesse des voitures étaient donc montrées du doigt. Sur le premier point, il faut bien admettre qu'il y avait du travail, la réalité étant que des spectateurs massés au bord des routes, au Portugal et en Italie notamment, allaient jusqu'à détaler au dernier moment à l'arrivée des voitures, quand ils ne jouaient pas au torero au passage de celles-ci... Ce point est devenu une priorité pour les instances dirigeantes et la première fois que l'auteur de ces lignes se rendit sur la fameuse bosse de Fafe au Portugal, il y a près de vingt ans, il ne put que constater l'immense chemin accompli en observant les spectateurs sagement alignés à distance raisonnable de l'étroite route en terre servant de piste d'envol aux concurrents.

Si nul ne contestait que le comportement et la sécurité des spectateurs étaient de réels sujets d'inquiétude, il y avait matière à des argumentations sans fin concernant les voitures. En effet, une "petite" Groupe A aux mains d'un pilote privé ou amateur n'aurait-elle pas fait autant de dégâts au Portugal que la "grosse" Groupe B de Santos ? D'un autre côté, des accidents aux conséquences si dramatiques s'étaient-ils déjà produits sur un Tour de Corse avant l'apparition des Groupe B ?

Ces mêmes interrogations se sont fait entendre, trois décennies plus tard, avec l'avènement des nouvelles World Rally Cars 2017. Dotées, pour dire les choses simplement, d'une bride d'admission du turbo plus large et d'une aéro très développée, elles sont l'aboutissement du retour à des voitures plus en phase avec l'idée de compétition. Une tendance entamée en réalité peu de temps après l'imposition du Groupe A comme catégorie principale de la discipline, puisque les autos répondant à cette réglementation au début des années 90 n'avaient déjà plus grand-chose de comparable avec celles qui couraient en 1987, et poursuivie avec la création de la catégorie WRC à partir de 1997.

Malgré un enthousiasme quasi unanime, l'arrivée de la troisième génération des World Rally Cars a soulevé des doutes chez certains. Le directeur de la compétition d'un constructeur anciennement engagé en WRC nous expliquait en substance, au printemps dernier, qu'il ne voyait pas l'intérêt d'un tel changement, à l'heure où l'on parle de sécurité mais aussi de réduction des coûts. Notre collaborateur Denis Giraudet, copilote vainqueur de cinq rallyes du "mondial" dont celui de Finlande, faisait part quant à lui dès sa première chronique pour Motorsport.com, avant le Monte-Carlo, de ses doutes concernant la vitesse et la maîtrise de ces machines... en Finlande, justement.

Ott Tänak, Martin Järveoja, Ford Fiesta WRC, M-Sport

Cette question s'est posée de façon plus directe avec l'annulation du second passage dans la spéciale de Knon, dès la seconde manche de la saison en Suède, après qu'Ott Tänak l'a parcourue à près de 138 km/h de moyenne le matin. Apparemment un excès de zèle des organisateurs, à en croire les équipages qui considéraient que la sécurité des spectateurs et la leur étaient pleinement assurées. "La route était toute droite, pas dangereuse, juste ennuyeuse. Mais elle était déjà comme ça quand la FIA l'avait inspectée", avait ironisé un pilote.

Pas plus de 130 km/h

Mais cela suffit à susciter des craintes du côté de la FIA, Jarmo Mahonen, le responsable des rallyes au sein de la fédération, enjoignant alors les organisateurs à ne pas prévoir de spéciales sur lesquelles la moyenne serait supérieure à 130 km/h. Et d'argumenter qu'au volant pourtant d'une DS3 WRC de l'année dernière, Stéphane Lefebvre avait lui-même battu, sur cette spéciale de Knon, de 2,67 km/h la moyenne record en spéciale établie à 126,6 km/h par Kris Meeke avec la même voiture, en Finlande l'année dernière. Tout en précisant que quand il était lui-même organisateur, il se refusait à mettre en place d'artificielles chicanes, et en recommandant clairement de sélectionner des routes "plus petites" sur lesquelles les vitesses atteintes seraient forcément moins élevées.

Kris Meeke, Paul Nagle, Citroën DS3 WRC, Abu Dhabi Total World Rally Team

La question de la vitesse se posait donc avec force avant les deux épreuves les plus rapides de la saison, les Rallyes de Pologne et de Finlande disputés respectivement début et fin juillet. L'ancien "1000 Lacs", notamment, a fait l'objet de bien des inquiétudes au point que l'organisation a pour ainsi dire été sommée de trouver des moyens plus ou moins naturels de ralentir les voitures. En 2016, six spéciales de cette épreuve dépassaient en effet les 130 km/h de moyenne et le célèbre secteur d'Ouninpojha, par exemple, dont la portion la plus lente et étroite a été supprimée cette année pour lui donner une longueur plus proche des standards de la télévision, pourrait dépasser les 140 km/h.

Le problème ne s'est finalement pas posé en Pologne, en raison des exécrables conditions météo. Mais c'est bien celui de la sécurité des spectateurs qui est réapparu au grand jour sur ce rallye, lequel s'était déjà vu infliger un carton jaune par la FIA en raison d'un problème de même type en 2015. L'édition de cette année a pris du retard le vendredi et plus encore le samedi, en raison, a-t-il été indiqué alors, de spectateurs mal placés dans certaines spéciales.

Des spectateurs au bord d'une spéciale

La réalité était bien pire encore. Certains équipages ont rapporté des manquements criants à la sécurité. Des spectateurs étaient passés outre les recommandations des commissaires pour se placer devant eux et à seulement quelques centimètres des WRC lancées à vive allure. Des voitures de spectateurs ont été signalées en spéciale, et même un camion de pompiers passé sous le nez d'un policier après la fermeture de la route pour emprunter une spéciale en sens inverse... et tomber nez-à-nez avec une voiture de rallye, heureusement sur une portion plutôt large.

"Il y a eu quelques problèmes de sécurité durant le rallye et nous devons maintenant enquêter et tirer nos conclusions", a déclaré Mahonen à Motorsport.com. Doux euphémisme. "L'incident du camion de pompiers est visé par une enquête locale et ce n'était en rien quelque chose de lié au rallye. Mais comment cela a-t-il pu se produire ? D'après les informations que j'ai reçues, il a presque roulé sur un policier... Nous avons eu de la chance que rien ne soit arrivé, mais ceci ne fait pas partie du rallye", a-t-il en effet ajouté, évoquant un "week-end de survie" pour lui et pour Michèle Mouton, déléguée de la FIA  à la sécurité .

"Comment pourrions-nous revenir ici ? Ça n'a aucun sens, et les gens ne comprennent pas que la voiture peut partir dans n'importe quelle direction", a pour sa part réagi un pilote, faisant écho aux propos tenus par la majorité des directeurs d'équipe qui jugeaient la situation inacceptable. "Nous roulons dans ces trous [ornières] sur la route et parfois, la voiture décolle littéralement et peut aller n'importe où. Ils restent derrière des ballots de paille et pensent que cela peut les sauver – aucune chance. Si nous partons en sixième dans un champ, cela peut être un grand désastre."

Le "simple" problème de la vitesse des voitures peut donc être géré en ce sens que c'est au pilote et à la personne assise à son côté qu'il revient d'évaluer le rythme à adopter en fonction du terrain. En ce sens, aussi, que les organisateurs pourraient écouter davantage les équipages avant de prendre des décisions comme celle d'annuler la spéciale en Suède, nous faisait remarquer récemment un copilote. Mais permettre que soit mise en jeu la vie de ces mêmes équipages, ainsi que celle des spectateurs, en ne jugulant pas le comportement de certains d'entre eux n'est pas tolérable.

Déjà sur la sellette, le Rallye de Pologne, pourtant très apprécié des pilotes pour, et c'est un comble, les vitesses très élevées qu'ils y atteignent avec un niveau élevé de sécurité en raison des immenses dégagements naturels qu'offrent les spéciales, vient peut-être d'y laisser sa place au calendrier.

Propos recueillis par David Evans

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